Le sculpteur florentin fait de l'ancienne prostituée repentie, qui vit recluse dans la grotte de la sainte-Baume, une femme usée par les jeûnes et la pénitence. Même sa célèbre chevelure, qui l'enveloppe presque entièrement, paraît hirsute et poisseuse.
A l'opposé de la vision de Donatello, la chevelure avec laquelle la pécheresse essuya les pieds de Jésus après les avoir oints de parfum, est chez le peintre vénitien une parure puissamment charnelle qui redouble l'impudeur plus qu'elle ne la masque.
"Pour les hommes, la mort est une sorcière brandissant une faux pour faucher leur vie. Pour les femmes, la mort est un squelette mâle qui les tire par les cheveux vers la tombe." (Agnès Varda)
"Je m'arrête au seuil de ces boutiques, et je vois se dérouler les cheveux dans leurs grottes : Serpents, serpents, vous me fascinez toujours." Quel aurait été l'émoi d'Aragon devant la forêt de serpents ornant la tête de la fameuse Furie !
Quand on voulut dénuder cette jeune chrétienne conduite en prison pour avoir résisté aux avances empressées du fils du Préfet de Rome, ses cheveux auraient miraculeusement poussé, recouvrant tout son corps et protégeant ainsi sa pudeur.
Femme essuyant la sueur de son visage (vers 1780) (6 / 12)
Titre de l'œuvre
Femme essuyant la sueur de son visage
Artiste
Utamaro Kitagawa
Evocation
L'utilisation du noir absolu "métamorphose les coiffures féminines, harmonieusement architecturées, en de gigantesques fleurs sombres, qui font ressortir la gracilité d'une nuque, la pâleur d'un visage." (Janette Ostier, galeriste art japonais)
"Je suis l'esclave de mes cheveux" disait cette impératrice. Ils tombaient jusqu'aux talons en vagues couleur châtain. Selon sa nièce Marie Larisch : "Elle rendait un culte à sa beauté comme un païen à ses idoles, elle se mettait à genoux devant elle."
Une chevelure d'incendie embrase le portrait de la première épouse d'Adam, tentatrice puissante et diabolique. "Méfiez-vous de ses cheveux blonds ; quand elle les enroule autour du cou d'un garçon, il perd pour toujours sa liberté." Goethe
"J'avais ta chevelure autour de mon cou, j'avais tes cheveux noirs autour de ma nuque."(Pierre Louÿs, Chansons de Bilitis) pourrait dire le squelette de ce tableau troublant, où l'on ne sait plus qui embrasse et qui tue.
"Je t'aimais pour tes cheveux. Maintenant que tu n'en as plus, je ne t'aime plus" dit la chanson. L'artiste divorcée depuis peu sacrifie sa chevelure et s'habille en homme pour dire sa révolte contre l'obligation d'être belle, vécue comme un esclavage.
D'après un conte de Grimm où la chevelure de l'héroïne est son unique lien avec le monde extérieur. "Cette pièce parle d'un corps emmuré, d'un personnage enfermé dans une tour, où la longueur des cheveux correspond au temps d'enfermement."