Né à Volos, (port grec d'où partit Jason pour conquérir la Toison d'or), Chirico verra toujours dans la Grèce classique et dans les mythes du paganisme grec, l'origine de son propre itinéraire culturel, comme Nietzsche dont il subit alors l'influence.
Horloge évoquant le temps qui passe, places désertes, monuments à portiques, hommes vêtus du péplum grec, ces références à Florence mêlées à celles de l'Athènes de son enfance, reparaitront souvent dans l'œuvre de Chirico.
L'unique monument qui est le sujet de ce tableau semble bien être inspiré de la Mole Antonelliana de Turin, structure en maçonnerie dont le dôme culmine à 168 mètres, un de ces "édifices métaphysiques" dissimulant secrets et mystères.
Tableau réunissant tous les motifs caractéristiques de la première période du peintre, dite "des énigmes" ou "des places italiennes" : la place déserte, les arcades, la statue d'Ariane abandonnée, le ciel bleu, les ombres portées, l'horloge, le train.
La place San Carlo de Turin, évoquée par la statue équestre, devient ici un décor vide et silencieux où le temps est suspendu. Seul le monument central a une visage de chair, avec des yeux qui guettent et une bouche-porte en partie barrée d'ombre.
Gare Montparnasse ou La Mélancolie du départ (1914) (6 / 12)
Tableau
Gare Montparnasse ou La Mélancolie du départ
Approche
Aux motifs habituels évoquant le départ, le voyage, l'errance, ce tableau ajoute un élément énigmatique : le régime de bananes du premier plan. Ces fruits, périssables par définition, pourraient suggérer, comme l'horloge, le temps qui passe.
Dans un univers sans humains (suggéré par le gant de caoutchouc vide), où tout est de passage (comme le train et sa fumée), la tête de l'Apollon du Belvédère pourrait représenter la seule valeur solide : l'amour du peintre pour son art et l'antiquité.
À partir de 1914, un nouveau motif, celui du mannequin sans visage, apparait dans les tableaux de Chirico : assis sur un billot de bois, sans bras, aveugle mais doté du puissant œil de l'esprit, il est l'artiste poursuivant son aventure créative.
Intérieur métaphysique avec biscuits (1916) (9 / 12)
Tableau
Intérieur métaphysique avec biscuits
Approche
Dans les appartements de l'ancien ghetto de Ferrare, "il y avait des gâteaux et des biscuits avec des formes extrêmement métaphysiques et étranges" écrit le peintre. Ici, ils sont disposés de manière à reproduire grossièrement un visage humain.
À Ferrare, où il est affecté comme soldat en 1916, Chirico peint une série d'intérieurs de logements, de boutiques, en accumulant des objets hétéroclites : équerres, cartes topographiques, avec une prédilection pour le motif : tableau dans le tableau.
Sur une place publique déserte à l'atmosphère italienne, se dresse comme un totem l'imposante statue d'un géant extraterrestre, d'un surhomme nietzschéen, fait de draperies, de planches, boîtes, cadres, et évoquant la force prométhéenne de l'Esprit.
Ferrare, où Chirico est affecté comme soldat en 1916, est reconnaissable au château de la famille d'Este, voisinant ici avec une usine, en arrière-plan d'une immense place sur laquelle se dressent deux mannequins énigmatiques.